Les Etats-Unis sont-ils à l'aube d'une décennie perdue ?
Par Marc Mayor rédacteur de La Lettre de Marc Mayor
Je prends les paris, le marché actions américain rebondira lorsque Ben Bernanke -- papy Soupline, pour les intimes -- annoncera formellement qu'il remet une couche d'assouplissement quantitatif. Ce sera la fête, le patron de la Fed sera enfin le héros qu'il a toujours cru pouvoir devenir.
Les cours grimperont pendant six semaines avant de chuter de 30% en quatre mois et de toucher un plancher deux ans plus tard et 45% plus bas. Comment je sais ça ? Car je suis Madame Soleil Levant et je prédis l'avenir des Etats-Unis.
◊ Retour sur le Quantitative Easing à la sauce japonaise
C'est en effet du côté du soleil levant qu'il faut regarder pour voir le futur. Le Japon a eu recours aux mesures de politique monétaire dites "non conventionnelles" dès mars 2001. Tokyo a alors sorti l'artillerie lourde pour booster son économie engluée dans la déflation et une croissance digne d'un escargot asthmatique. La Banque du Japon, la BoJ, s'est mise à acheter des obligations du gouvernement japonais.
Pour une fois, je ne jouerai pas au cynique, ou si peu... Oui, le succès a été au rendez-vous, je le reconnais. Oui, les Bourses ont rebondi à l'annonce officielle de l'assouplissement quantitatif. Oui, le Nikkei a bondi de moins de 12 000 points à près de 14 500 points en six semaines. Oui encore, il a touché un sommet après ces six semaines d'espoir.
Ensuite, les choses se sont gâtées. Ce soudain optimisme a disparu aussi vite qu'il avait surgi de la planche à billets. La Bourse japonaise a perdu 45% au cours des quatre mois suivants. Le Nikkei s'est fortement ancré dans une tendance baissière, conclue par un plus bas touché en avril 2003 -- 45% en dessous du pic issu des six semaines de grâce. Et le Japon a glissé dans une décennie perdue pour les investisseurs.
C'est ce qui attend les Etats-Unis, dont le futur a des airs de fatalité. Une fatalité barbue et dégarnie qui dirige la Réserve fédérale, si vous voyez à qui je fais allusion. L'expérience japonaise a montré que l'assouplissement quantitatif ne permettait pas de créer le peu d'inflation nécessaire à la relance de l'économie, ni de lutter efficacement contre le chômage. La demande privée n'a pas été stimulée et la déflation s'est maintenue alors que la BoJ achetait des obligations à tour de bras.
◊ Le Quantitative Easing made in USA
Compte tenu de ce douloureux précédent, il est difficile d'être optimiste pour l'Amérique. Ben Bernanke semble déterminé à faire en sorte que l'histoire se répète, avec quelques années de retard et de l'autre côté du Pacifique. Le 15 octobre dernier, le patron de la Réserve fédérale a laissé entendre dans un discours à Boston qu'il allait probablement remettre une couche de "Soupline planche à billets" -- comprenez assouplissement quantitatif -- dans l'économie américaine. Il prépare le terrain, en quelque sorte.
Son objectif est simple : obtenir un peu d'inflation et réduire largement le chômage. Comment ? En s'intéressant au niveau des prix -- et non plus à l'inflation -- et en élargissant le bilan de la Fed, qui est le résultat du quantitative easing... papy Soupline, et le monde de Wall Street est plus doux.
L'idée consiste à obtenir une petite augmentation de l'inflation à moyen terme, tout en conservant l'inflation à long terme très basse. Les niveaux actuels des spreads sur le marché obligataire US montrent que les investisseurs s'attendent exactement à l'inverse : une poursuite de la désinflation à court et moyen terme, et une augmentation des prix à long terme.
C'est peut-être pour convaincre les sceptiques que Ben l'hélico a également mentionné un joker qu'il pourrait utiliser : un langage plus direct. Attention, c'est du lourd. En modifiant les termes pesés et re-pesés de son traditionnel communiqué, la Fed pourrait indiquer de manière plus claire qu'elle entend garder des taux d'intérêt à court terme bas pendant plus longtemps que ne le pense le marché.
Un langage plus direct : la Fed utilisera-t-elle bientôt des gros mots, pour convaincre le marché, voire l'effrayer ? Il y en a un qui me vient à l'esprit, en tout cas, de gros mot. Il porte bonheur quand on marche dedans, c'est peut-être pourquoi Ben Bernanke s'obstine à en faire la base de sa politique monétaire.
Remarquez, ça finira peut-être par lui porter chance. Les Etats-Unis en auront bien besoin, sinon le pays risque de se prélasser dedans pendant une bonne décennie. C'est Madame Soleil Levant qui vous le dit.
Par Marc Mayor rédacteur de La Lettre de Marc Mayor
Je prends les paris, le marché actions américain rebondira lorsque Ben Bernanke -- papy Soupline, pour les intimes -- annoncera formellement qu'il remet une couche d'assouplissement quantitatif. Ce sera la fête, le patron de la Fed sera enfin le héros qu'il a toujours cru pouvoir devenir.
Les cours grimperont pendant six semaines avant de chuter de 30% en quatre mois et de toucher un plancher deux ans plus tard et 45% plus bas. Comment je sais ça ? Car je suis Madame Soleil Levant et je prédis l'avenir des Etats-Unis.
◊ Retour sur le Quantitative Easing à la sauce japonaise
C'est en effet du côté du soleil levant qu'il faut regarder pour voir le futur. Le Japon a eu recours aux mesures de politique monétaire dites "non conventionnelles" dès mars 2001. Tokyo a alors sorti l'artillerie lourde pour booster son économie engluée dans la déflation et une croissance digne d'un escargot asthmatique. La Banque du Japon, la BoJ, s'est mise à acheter des obligations du gouvernement japonais.
Pour une fois, je ne jouerai pas au cynique, ou si peu... Oui, le succès a été au rendez-vous, je le reconnais. Oui, les Bourses ont rebondi à l'annonce officielle de l'assouplissement quantitatif. Oui, le Nikkei a bondi de moins de 12 000 points à près de 14 500 points en six semaines. Oui encore, il a touché un sommet après ces six semaines d'espoir.
Ensuite, les choses se sont gâtées. Ce soudain optimisme a disparu aussi vite qu'il avait surgi de la planche à billets. La Bourse japonaise a perdu 45% au cours des quatre mois suivants. Le Nikkei s'est fortement ancré dans une tendance baissière, conclue par un plus bas touché en avril 2003 -- 45% en dessous du pic issu des six semaines de grâce. Et le Japon a glissé dans une décennie perdue pour les investisseurs.
C'est ce qui attend les Etats-Unis, dont le futur a des airs de fatalité. Une fatalité barbue et dégarnie qui dirige la Réserve fédérale, si vous voyez à qui je fais allusion. L'expérience japonaise a montré que l'assouplissement quantitatif ne permettait pas de créer le peu d'inflation nécessaire à la relance de l'économie, ni de lutter efficacement contre le chômage. La demande privée n'a pas été stimulée et la déflation s'est maintenue alors que la BoJ achetait des obligations à tour de bras.
◊ Le Quantitative Easing made in USA
Compte tenu de ce douloureux précédent, il est difficile d'être optimiste pour l'Amérique. Ben Bernanke semble déterminé à faire en sorte que l'histoire se répète, avec quelques années de retard et de l'autre côté du Pacifique. Le 15 octobre dernier, le patron de la Réserve fédérale a laissé entendre dans un discours à Boston qu'il allait probablement remettre une couche de "Soupline planche à billets" -- comprenez assouplissement quantitatif -- dans l'économie américaine. Il prépare le terrain, en quelque sorte.
Son objectif est simple : obtenir un peu d'inflation et réduire largement le chômage. Comment ? En s'intéressant au niveau des prix -- et non plus à l'inflation -- et en élargissant le bilan de la Fed, qui est le résultat du quantitative easing... papy Soupline, et le monde de Wall Street est plus doux.
L'idée consiste à obtenir une petite augmentation de l'inflation à moyen terme, tout en conservant l'inflation à long terme très basse. Les niveaux actuels des spreads sur le marché obligataire US montrent que les investisseurs s'attendent exactement à l'inverse : une poursuite de la désinflation à court et moyen terme, et une augmentation des prix à long terme.
C'est peut-être pour convaincre les sceptiques que Ben l'hélico a également mentionné un joker qu'il pourrait utiliser : un langage plus direct. Attention, c'est du lourd. En modifiant les termes pesés et re-pesés de son traditionnel communiqué, la Fed pourrait indiquer de manière plus claire qu'elle entend garder des taux d'intérêt à court terme bas pendant plus longtemps que ne le pense le marché.
Un langage plus direct : la Fed utilisera-t-elle bientôt des gros mots, pour convaincre le marché, voire l'effrayer ? Il y en a un qui me vient à l'esprit, en tout cas, de gros mot. Il porte bonheur quand on marche dedans, c'est peut-être pourquoi Ben Bernanke s'obstine à en faire la base de sa politique monétaire.
Remarquez, ça finira peut-être par lui porter chance. Les Etats-Unis en auront bien besoin, sinon le pays risque de se prélasser dedans pendant une bonne décennie. C'est Madame Soleil Levant qui vous le dit.