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Le Pacte budgétaire européen en question

  • roland

    Cet article n'est pas de moi, mais d'une amie à moi, étudiante à Dauphine. Vous pouvez la suivre sur son blog :)

    http://monde-d-aujourdhui.blog.fr/

    L'Irlande a accepté jeudi 31 mai le Pacte budgétaire Européen, officiellement appelé Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, avec 60,3% de oui. L'Irlande est le seul pays à avoir organisé un référendum avant de ratifier ce pacte renouvelant la règle d'or budgétaire. Depuis 1987, la Cour suprême a rendu obligatoire une révision constitutionnelle pour l'intégration de certains traité, et toute révision constitutionnelle doit être soumise dans ce pays à un référendum.

    Contenu du Pacte
    Ce traité a été formellement adopté au Sommet de Bruxelles en mars 2012, à l'exception de la République Tchèque et du Royaume-Uni, qui n'avaient déjà pas accepté le Six Pack de l'année dernière. Le Premier Ministre britannique, David Cameron, aurait opposé son veto si son exigence de soustraire la City de Londres à la surveillance financière en cas de besoin n'était pas satisfaite, exigence à laquelle l'Europe ne pouvait répondre. Le traité a donc pris une dimension intergouvernementale, et sera restreint aux douze pays membres de la zone euro, auxquels se joindront au moins six des dix pays membres de l'Union européenne non membres de la zone euro.
    La règle d'or introduite dans l'article 3 impose aux administrations publiques d'avoir un budget en équilibre ou en excédent, et limite le déficit structurel à 0,5% au lieu de 1% auparavant. Le déficit structurel désigne le déficit corrigé des variations conjoncturelles, autrement dit le déficit tel qu'il serait dans la situation où la production serait à son niveau «potentiel». Une mauvaise conjoncture économique creusant mécaniquement le déficit, il s'agit de neutraliser ce déficit.
    Toutefois cette limitation donne lieu à deux exceptions. Lors de situations exceptionnelles face auxquelles les gouvernements sont impuissants le déficit structurel peut se révéler supérieur, et un déficit structurel de 1% est toléré pour les pays dont la dette est durablement inférieure à 60%, un des critères de convergence dit «de Maastricht». Dans les autres cas, si le déficit structurel dépasse 0,5%, des mécanismes de coercition sont enclenchés, devenant automatiques si le déficit total passe la barre des 3%, deuxième critère de convergence de Maastricht. Le nouveau pacte devra être retranscrit dans les normes nationales dans un délais d'un an, et la Cour de Justice européenne aura un droit de regard sur son application.
    Au-delà de cette règle le MES, mécanisme européen de stabilité, ne pourra aider que les pays adhérant à ce Pacte et sera géré par la BCE. Ce fonds permanent destiné à aider les pays en difficultés succédera dès juillet au Fonds européen de stabilité financière créé au printemps 2010.

    Histoire du Pacte

    Pour mieux comprendre cette règle d'or, revenons au Traité de Maastricht, qui marque la première étape. Ce traité adopté en février 1992 met en place deux critères de convergence budgétaire: La dette publique est limitée à 60% du PIB et le déficit à 3%. Ce Traité a été signé par l'ensemble des pays de la Communauté économique européenne (CEE), tout comme le Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) en 1997. Ce Pacte s'inscrit dans la lignée du traité fondateur et le renforce avec deux dispositions principales: la surveillance multilatérale et la procédure de déficit excessif. Les États de la zone euro présentent chaque année un programme de stabilité, permettant au Conseil de l'Europe d'adresser aux pays des recommandations. La procédure de déficit excessif est une mesure dissuasive, déclenchée si un pays dépasse la limite des 3% du PIB pour le déficit, et ne respecte pas les recommandations du conseil pour mettre fin à cette situation. Mais cette procédure reste sans effet: jusqu'à aujourd'hui, cinq pays ont fait face à ce processus, à savoir l'Allemagne, la Grèce, la France, le Portugal et les Pays-Bas, mais aucun n'a fait l'objet d'une sanction, cette sanction n'étant appliquée que si une majorité qualifiée d’État la votait.
    Ce traité a été renforcé en octobre dernier par le Six Pack. Les sanctions sont maintenant appliquées mécaniquement, sauf si une majorité qualifiée d’État s'y oppose. Les sanctions sont là encore appliquées aux pays ne respectant pas les critères et ne suivant pas les recommandations du Conseil pour les atteindre, mais la vitesse de convergence vers ceux-ci est maintenant établie: l'écart entre la dette ou le déficit et la cible doit être réduit de 1/20 par an. Le nouveau pacte budgétaire n'introduit donc pas de changements majeurs. De plus, quant aux sanctions devenant automatiques, les États peuvent toujours prétexter mener des réformes importantes pour s'y soustraire, et une suspension de ces mesures est toujours possible en cas d'opposition d'une majorité qualifiée d’États. Les États devront aussi s'entendre pour coordonner leurs politiques économiques, mais elles resteront nationales.

    De nombreuses critiques

    Ce nouveau Pacte budgétaire est loin de ne faire que des heureux, subissant de plein fouet plusieurs critiques, dont la principale est de nuire à la croissance. François Hollande menace d'ailleurs de le renégocier pour y intégrer des mesures soutenant la croissance, ce à quoi la chancelière allemande Merkel s'oppose fermement. En effet, la politique d'austérité peut faire peser des risques sur la croissance. Selon cette règle d'or, le déficit structurel devra être presque nul en temps de bonne conjoncture économique, et faible en cas de crise, ce qui empêche les États de mener des politiques de relance à l'exception de celles induites par l'effet des stabilisateurs automatiques: les dépenses et les recettes réagissent au niveau de l'activité, la TVA dépendant de la consommation, l'impôt sur les revenus de la masse des salaires versés, … En dehors de ces stabilisateurs automatiques, on ne pourrait financer des investissements publics autrement que par une hausse d'impôt. Cette hausse d'impôt ferait porter l'effort sur les générations actuelles, alors qu'un emprunt le ferait porter par les générations futures, ce qui serait plus juste puisque certains investissements ne peuvent profiter qu'aux générations futures. C'est par exemple le cas des investissements dans la recherche, qui ne peuvent produire de résultats immédiats. En Europe, la tendance actuelle est plutôt selon la Cour des Comptes aux déficits structurels élevés, voire très élevés. Les États devront donc adopter des politiques budgétaires restrictives pour améliorer la situation, risquant d'accroître la récession économique que traverse l'Europe en raison de l'interconnexion des économies européennes.

    Des enjeux spécifiques à l'Irlande

    En Irlande, les enjeux sont particulier. Tout d'abord, l'issue du référendum était incertaine. Les indécis représentaient 20% de la population, l'abstention s'élevait à 49,40%, et la situation économique désastreuse de l'Irlande avec un fort taux de chômage, de 14%, faisait craindre un vote-sanction. L'opposition à deux reprises à des textes européens, le traité de Nice en 2006 et le traité de Lisbonne en 2008, ne faisait qu'emplifier cette crainte. Il avait fallu alors mettre en place des «clauses de sauvegarde» avant d'organiser un nouveau vote. Pour la plupart des économistes irlandais, le Pacte représente la voie de la stabilité, mais n'engendre pas de véritables changements au niveau budgétaire, le déficit public de plus de 30% en 2011 devant passer sous le seuil des 9% cette année. Toutefois, la stabilité représente un véritable enjeu pour l'Irlande, celle-ci dépendant fortement des investissements étrangers et donc devant protéger son image. Le pays bénéficie aussi de l'aide du FSEF, bientôt transformé en fonds permanent, le MES, mais il ne pourra continuer à percevoir cette aide qu'à condition de l'adhésion à ce traité. Ne pouvant plus en bénéficier, sa capacité à se financer sur les marchés diminuerait, ce qui provoquerait potentiellement une fuite des capitaux, accroissant les difficultés des banques et entreprises. Un refus aurait aussi remis en cause la place de l'Irlande au sein de l'Union monétaire, le Pacte étant considéré comme nécessaire à la poursuite de cette union monétaire.